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Non à l'abolition du Registre des armes
Le Reflet - 14 décembre 2011
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À la suite du dépôt par le gouvernement canadien du projet de loi C-19 visant à abolir l’enregistrement des armes à feu sans restriction et à détruire les données du Registre canadien des armes à feu, je tiens à vous informer de mes préoccupations pour la santé publique advenant l’adoption de telles mesures.
Au Canada, les armes à feu causent environ 800 décès par année, principalement des suicides commis dans une résidence privée avec une arme à feu sans restriction, comme un fusil de chasse ou une carabine. Plusieurs recherches ont démontré que la présence d’armes à feu au domicile quintuple le risque de suicide par arme à feu, et triple le risque d’homicide et d’accident par arme à feu, comparativement aux résidences où il n’y en a pas. Contrairement à ce que l’on semble croire, la majorité des décès par arme à feu sont le fait de gens n’ayant pas d’antécédents criminels. Pour ces personnes, souvent aux prises avec des problèmes personnels, conjugaux ou de santé mentale, l’accessibilité aux armes à feu est un important facteur de risque pour le passage à l’acte. Par conséquent, le contrôle de l’accès aux armes à feu constitue une mesure de prévention déterminante pour les personnes en situation de vulnérabilité.
Le registre permet de rendre disponible aux policiers l’information sur la possession d’armes à feu et de soutenir ces derniers dans leurs enquêtes. Il permet aussi de lier les armes à feu à leur propriétaire, et ainsi d’inciter les propriétaires à se conformer aux règlements sur l’achat, l’entreposage, la vente, le prêt ou le don d’armes à feu. Ces effets combinés ont comme résultats de réduire le nombre d’armes à feu mal entreposées, perdues, possédées illégalement et ainsi d’en réduire l’accessibilité aux personnes vulnérables ou en état de crise; cela, sans en empêcher l’utilisation légitime par les propriétaires qui en font un usage normal, par exemple pour la chasse ou le tir.
Le Registre des armes à feu est une composante complémentaire et essentielle aux autres mesures de la Loi sur le contrôle des armes à feu. Dans un mémoire récent, l’Institut national de santé publique du Québec révélait que la Loi sur le contrôle des armes à feu a permis de sauver 300 vies par année, entre 1998 et 2004. On est en droit de se demander pourquoi démanteler une telle loi qui a démontré son efficacité pour sauver des vies ?
Je tiens à vous rappeler que, de concert avec mes collègues de la santé publique du Québec, nous avons détaillé plusieurs autres aspects qui nous inquiètent au regard de ce projet de loi, dans un mémoire déposé à Ottawa, auprès du Comité permanent de la sécurité publique et nationale (SECU), le 14 novembre dernier.
Je vous demande donc de prendre en considération les points que je viens de vous soumettre ainsi que ceux qui sont exposés dans notre mémoire et de vous opposer à ce projet de loi.
Jocelyne Sauvé,
Directrice de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie