Voici un article fort intéressant de mon ami bretonnier Robert Morin que je publie sur le forum pour ceux et celle que ça intéresse. Une réflexion qui fait réfléchir...
Bonne lecture.
CAL20
La question, les options et, naturellement, le principe…
J’ai mis du temps à rédiger cet article : contraintes de temps, d’une part, mais aussi, et peut-être surtout, parce qu’il y a tant à dire (et si peu de temps…). Alors je me suis dit qu’il serait utile de me rappeler comment la question de l’homologation (certains préfèrent parler de l’officialisation) du National bécassier du CBQ en était venue à hanter nos discussions de bécassiers lors des deux dernières éditions de l’événement. Dans mon cas, la question s’est posée les deux fois de la même manière : en effet, aussi bien en 2011 qu’en 2012, quelques semaines avant la tenue du National, j’ai communiqué avec les clubs de race du Québec pour les inciter à faire inscrire leurs meilleurs sujets à ce seul concours sur gibier naturel au Québec (et peut-être même au « Canada »). Dans certains cas, j’ai reçu des désistements polis, du genre « Le National entre en conflit avec notre activité XYZ, déjà prévue pour nos membres » ou encore «Pour nous intéresser, il faudrait que l’événement soit reconnu et qu’il donne droit à des mentions au pedigree »; mais dans d’autres cas, la réponse reçue avait une saveur nettement plus méprisante à l’égard du National, du genre « Ce concours n’a aucune valeur, c’est juste un party entre chums et il n’apporte rien quant à la sélection des meilleurs chiens bécassiers ».
Alors, je me suis arrêté pour réfléchir à ce qui me plaisait particulièrement dans ce concours appelé le « National », moi qui avais déserté les clubs de chiens d’arrêt et les concours depuis belle lurette pour me consacrer aux seuls plaisirs pleinement satisfaisants de la chasse avec mes Bretons et quelques fidèles amis. Bien sûr que le National offrait tout ce côté convivial et festif d’une rencontre entre vrais bécassiers et chasseurs avec chiens à quelques semaines de l’Ouverture. Mais en quoi pouvait-on considérer comme un défaut cette belle ambiance de franche camaraderie, très proche de la véritable ambiance de chasse et totalement exempte de la moindre considération mercantile, de cet appât du gain généralement associé à la présence d’éleveurs en concurrence les uns avec les autres et qui semblent avoir des millions de $ en jeu? Mais il y avait plus que juste cela, même si je ne m’y étais pas encore trop arrêté pour l’analyser.
C’est au fil des discussions lors des deux dernières éditions de l’événement que l’aspect primordial du National m’est apparu clairement : Le National du CBQ est le seul concours qui se tient sur du gibier naturel et dans des conditions de chasse pratique au Québec. Et en corollaire à ce constat se pose la question cruciale suivante : Comment se fait-il qu'au Québec, avec notre net avantage en termes de densités de gibier, nous nous retrouvions à ne tenir qu'UN SEUL concours sur gibier naturel par année, soit le National du CBQ? Ce qui m’amena tout naturellement à m’intéresser à ce qui se fait ailleurs, c’est-à-dire en Europe et aux États-Unis.
Mes recherches du côté du Vieux continent ont révélé que les Européens, qui ont des densités de gibier très faibles comparativement aux nôtres, tiennent leurs grands fields, concours et évaluations presque exclusivement sur gibier naturel. Ils doivent avoir de bonnes raisons de miser ainsi sur le naturel plutôt que sur le gibier d'élevage. Certes, il y a le fait que notre gibier est davantage un gibier de forêt (bécasses et gélinottes), donc plus difficile à gérer, contrairement aux Européens qui disposent (mais de moins en moins) d'une population de perdreaux qui facilite la tenue des concours aux champs. Par contre, cela ne les empêche pas de tenir des « challenges » de plusieurs concours cumulatifs sur leurs quelques rares bécasses, dans les forêts denses de Bretagne (Challenge d’Armorique, Challenge Le Louet pour les Épagneuls bretons, La clochette d’or, La clochette d’argent, les Championnats de Pologne sur gibier naturel, Le grand prix de la Fédération des Associations Nationales des Bécassiers du Paléarctique Occidental, etc.), de même que les grands fields renommés sur bécassines aux marais (Tribehou ou Le Hommet D'Arthenay) et sur gibier de montagne (tétras et lagopèdes). À cet égard, nous aurions, nous aussi, la possibilité d'organiser au Québec des concours sur bécassine... il faudrait juste que les clubs y consacrent une fraction du temps qu'ils passent à organiser des concours sur « cocottes »...
N’oublions pas que les éleveurs et cynophiles européens investissent des sommes considérables pour venir au Québec, dans le but avoué de « créancer » leurs chiens sur nos gibiers, un peu comme le font tous les grands dresseurs de chiens d’arrêt de France qui, durant les mois d’hiver, se déplacent à grands frais vers l’Andalousie pour y mettre leurs chiens en contact avec les perdreaux naturels qui y abondent. De plus, dans les clubs de race, comme le CEB de France, les géniteurs sont recommandés en fonction d’une échelle de valeurs et, comme par hasard, les classements en concours sur gibier naturel donnent droit au double des points obtenus en concours sur « cocottes » ou gibier d’élevage.
À ce propos, je me permets de citer ici quelques réflexions pertinentes d’un grand bretonnier français, Alain Leforestier, qui a écrit, dans le site web du Club national des bécassiers de France, un traité très intéressant sur la lecture des pedigrees
« Puisque je vous livre mon point de vue et que nous sommes entre bécassiers, je pense également qu'il est important de savoir sur quels gibiers ont été obtenus les classements. Pour ma part, les chiens classés sur gibier naturel (perdreaux de printemps et gibiers sauvages) ont ma préférence...... Ce qui ne veut pas dire que des chiens classés en automne sur gibier lâché ne feront pas de grands bécassiers, disons simplement que je crois que c'est moins sûr. »
ou encore, à propos des concours sur gibier lâché :
« Il s'agit là de gibier d'élevage, et à mes yeux on ne peut pas y juger du côté trouveur et autoritaire d'un chien. »
Du côté des États-Unis, j’ai fait moins de recherches, mais notre ami Rémi Ouellet a dégoté un excellent site web (
http://www.fosteraward.com) consacré à de grands concours sur bécasse et sur gélinotte, qu’ils appellent généralement « Grouse Classic », « Woodcock Classic » ou « Grand National Grouse and Woodcock Invitational Championship ». Ces événements renommés se tiennent sur invitation des chiens qui se sont le mieux illustrés pendant l’année dans des concours sur… gibier naturel.
Je me suis donc dit qu'au Québec, il faudrait miser davantage sur ce « cadeau du ciel » que sont nos grands espaces et nos densités de gibier enviables; que l'on apprenne à reconnaître cet atout pour la production de chiens d'arrêt de qualité supérieure et à mettre cet avantage en valeur, car pour le moment, en négligeant ainsi systématiquement de tenir nos concours sur gibier naturel, c'est comme si nous avions une Ferrari entre les mains et que nous nous contentions de la conduire lentement dans une allée de stationnement d'un centre d'achats...
J’aimerais porter à votre attention deux points importants dans ce qui précède. Premièrement, et vous l’avez sans doute vous-mêmes déjà remarqué par le passé, en tant que Québécois, nous avons la fâcheuse habitude de négliger nos points forts et de trouver que « le gazon est toujours plus vert chez le voisin ». Je me souviens de l’époque où j’étais conseiller municipal. Je siégeais avec un vieux Mathalois (habitant de St-Jean-de-Matha), un natif qui louangeait à qui voulait l’entendre la beauté des chutes de Sainte-Ursule, en Mauricie, où il se rendait régulièrement. Cependant, il n’avait jamais visité les chutes Monte-à-Peine de son propre village (selon moi bien plus jolies et plus impressionnantes)! Ou encore, ça me rappelle aussi les propos de mon ami Jean Daneau qui, avec raison, n’a jamais digéré que les cynophiles québécois aient sabordé un fleuron qui était le nôtre, soit la Fédération québécoise des clubs de chiens d’arrêt (FQCCA), abandonnée sous les pressions d’éleveurs et de cynophiles compétiteurs aveuglés par le « glamour » d’organisations du Rest of Canada ou des États-Unis… Comme dirait l’autre colonisé : « Think big s’tie! »… Personnellement, ayant inscrit un chien à ce qu’on appelle maintenant un TAN (test d’aptitudes naturelles, version inspirée de France), je peux vous dire que je me suis ennuyé du format « Évaluation des qualités naturelles » que proposait à l’époque la FQCCA… Aurions-nous lâché la proie pour l’ombre? En tout cas, c’est exactement ce qu’il faudra éviter de faire quand nous déciderons de l’avenir de notre National bécassier.
Regarder ce qui se fait ailleurs dans le domaine des concours sur gibier naturel, ça ne veut pas dire pour autant dénigrer ce qui se fait déjà ici. Les clubs québécois de chiens d’arrêt sont très actifs et organisent de nombreuses activités très utiles en soi. Il faut juste se demander s’il n’y aurait pas moyen de mieux tirer parti du fait que le Québec offre d’excellentes possibilités pour la tenue de concours sur du naturel.
Le second point à remarquer, c’est que tant en Europe qu’aux États-Unis, les concours sur gibier naturel se tiennent en séries, c’est-à-dire qu’ils savent que, comme le mentionne Alain Leforestier : « Les oiseaux sont sauvages et il faut « aller les chercher », et concernant bécasses et bécassines, nous avons affaire à des migrateurs qui peuvent être là en quantité ou non.» Autrement dit, dans un concours sur gibier naturel, c’est comme à la chasse, il y a un important facteur de hasard, et les contacts des chiens avec le gibier sont aléatoires. C’est un aspect auquel nous ne sommes pas habitués ici au Québec, puisque dans les concours sur gibier d’élevage, rares sont les chiens inscrits qui font un parcours « PO » (« pas d’occasion » comme disent les Français), c’est-à-dire que « le chien n'a pas eu d'occasion pendant son parcours et a peut-être été repris toujours sans occasion, mais la qualité du parcours méritait un classement très élevé. » Et c’est pour cette raison que les cynophiles européens, tout comme les étasuniens, ont recours à la formule « Challenge », soit une série de plusieurs concours cumulatifs, qui permettent alors de réduire le facteur hasard et aux chiens inscrits de s’illustrer avec constance. Parlant de constance, je constate avec joie que le National, même s’il n’est pas jumelé à d’autres concours sur gibier naturel, parvient tout de même à primer avec constance et sous des juges différents des chiens de grande valeur, qui s’illustrent année après année et démontrent qu’ils sont trouveurs, qu’ils ont le « sens de la place », qualités primordiales à la chasse. Mais la valeur du National serait décuplée si on arrivait à l’intégrer à une série d’autres concours sur gibier naturel. Il suffirait d’un léger changement d’attitudes ou de changer la mentalité de certains propriétaires de chien qui se disent : « J’ai payé pour inscrire mon chien et je veux être certain qu’il aura l’occasion de travailler sur des oiseaux. Je veux en avoir pour mon argent...»
Bref, j’aimerais maintenant vous exposer les différentes options qui, selon moi, s’offrent au CBQ en ce qui concerne l’avenir du National et la question de son homologation.
Les options
Le statu quo strict
Cette option vise à préserver coûte que coûte le National dans sa formule actuelle, de crainte qu’il ne soit dénaturé si l’on tente de l’adapter pour le faire homologuer, probablement par le Club canin canadien (communément et plus réalistement appelé le « CKC »). D’une part, l’homologation CKC attirerait fort probablement une tout autre clientèle, certains éleveurs ressentant alors l’attrait des titres et des mentions inscriptibles au pedigree. Est-ce qu’on pourrait alors préserver l’esprit convivial si unique de l’événement? Vraiment pas certain. Et puis, bon an mal an, le National attire déjà une quinzaine de chiens, et il faut se demander si, sur le plan de la logistique et de la disponibilité des couverts et des ressources bénévoles, il serait réaliste de vouloir en accueillir davantage… Il suffit de songer au fait que dans sa formule actuelle, le vendredi soir, les juges et les concurrents font la fête ensemble, ils discutent ensemble des critères d’évaluation, de la logistique à adopter, de l’heure du tirage au sort des départs, du déroulement de la journée, etc., soit autant d’aspects qui, d’un strict point de vue d’un événement homologué CKC, pourraient probablement donner lieu à de possibles griefs de la part de certains participants mécontents de cette « promiscuité » avec les juges… Sans parler de la lourdeur administrative de l’événement homologué. Rappelons-nous ce qu’il est advenu de l’esprit de camaraderie qui animait jadis la Fédération des clubs de chiens d’arrêt et soyons TRÈS prudents, car l’esprit, l’ambiance, la convivialité sont des acquis très fragiles. Et puis, comme me l’ont rapporté deux amis bretonniers de France, les titres de gagnant de tel ou tel Championnat ou Challenge sur gibier naturel en Europe ne font pas l’objet de mentions spéciales au pedigree. Et pourtant, les éleveurs de partout en Europe s’y bousculent quand même, car ils savent que les vrais chasseurs sont très sensibles à la publicité générée autour des gagnants de ces événements prestigieux.
Le statu quo assorti d’un comité d’études
Personnellement, c’est l’option que je privilégie. Il s’agit de continuer à organiser le National dans sa formule actuelle, mais en gardant une possibilité de le bonifier éventuellement, une fois qu’on aura fait le tour des avenues possibles. Par exemple, un représentant du CKC m’avait déjà laissé entendre que le National pourrait conserver toute sa souplesse et ses règles actuelles, puisqu’il suffisait que ses règles soient clairement inscrites dans la fiche officielle d’inscription au concours ou « Programme officiel » (premium list en langue CKC). Selon ce représentant du CKC, l’organisme canadien accepterait facilement cette formule, mais cela reste à vérifier. Tout comme il faudrait approfondir la piste intéressante que suggérait Danny Leblanc de s’adresser à la SEPAQ comme partenaire, qui pourrait alors accueillir l’événement (pour ses couverts disponibles et ses infrastructures d’hébergement). Les deux parties y trouveraient leur compte, car le déroulement du National dans des couverts de la SEPAQ constituerait une excellente publicité permettant ensuite à la SEPAQ d’accroître sa clientèle une fois la saison de chasse venue (contrairement aux pourvoyeurs qui n’ont souvent pas intérêt à revoir les bécassiers québécois dans leurs couverts sans exclusivité qu’ils réservent à leur clientèle étrangère). Il y a aussi à étudier toute la possibilité de monter, en collaboration avec d’autres clubs de chiens d’arrêt du Québec, des formules de « Challenge », disons 4 concours organisés sur territoire SEPAQ et sur deux week-ends consécutifs du mois d’août. Il est certain que si l’on avait encore une Fédération de clubs, ce genre de synergie serait beaucoup plus facile à mettre en place efficacement… mais ça reste possible. Bref, on conserve le National dans sa formule actuelle, mais on forme un comité chargé d’étudier les possibilités et de déterminer leur faisabilité à moyen et à long terme. Je serais partant pour faire partie d’un tel comité.
L’homologation immédiate du National CBQ
Cela suppose beaucoup de calories afin, dans un premier temps, de devenir membres du CKC (le CBQ comme club et plusieurs de ses dirigeants), puis de « prouver » notre expertise (un peu humiliant, non?) par la tenue d’un certain nombre d’éditions officieuses du « National » (non reconnues ou sanctioned dans la terminologie CKC), pour enfin parvenir au Saint Graal, soit le National homologué et, surtout, ENCADRÉ par le CKC. Ce simple objectif, compte tenu de tous les risques qu’il comporte, ne me semble pas encore clairement justifié ni justifiable pour le moment. Comme je l’ai mentionné précédemment, nous sommes parfaitement dans l’inconnu, car nous ignorons quelles règles pourraient être imposées par le CKC, ni s’il faudrait dénaturer notre National pour l’adapter à la formule « field trial » du CKC, etc.
L’homologation immédiate en partenariat avec un ou plusieurs autres clubs
Entreprise peut-être possible à long terme, mais très risquée pour le moment et qui mérite d’être étudiée attentivement au préalable. Un autre club de chiens d’arrêt a déjà manifesté son intérêt à organiser un événement semblable au National du CBQ. Le seul avantage immédiat pour le CBQ serait sans doute de pouvoir bénéficier de la reconnaissance déjà acquise par cet autre club partenaire auprès du CKC, ce qui nous éviterait le purgatoire des « événements sanctionnés » obligatoires.
L’homologation immédiate par un autre organisme que le CKC
Possibilité hypothétique qui pourrait être étudiée, mais qui, selon moi, ne réglerait rien aux récriminations de ceux qui réclament l’inscription de titres au pedigree. Parmi les autres organismes d’homologation possibles : la FCC (Fédération canine canadienne), le Field Dog Stud Book (livre d’origine étasunien aussi appelé American Field). Par contre, ces organismes seraient sans aucun doute plus « accommodants » que le CKC…
Le Principe…
Pour terminer, et j’espère que vous ne m’en voudrez pas trop pour la longueur excessive de cet article dont je suis bien conscient, je m’en voudrais de ne pas vous parler d’autres recherches sommaires que j’ai faites, à partir de cette question initiale : Pourquoi les cynophiles européens et étasuniens accordent-ils autant d’importance aux concours sur gibier naturel, tandis qu’au Québec, nous nous contentons d’un seul concours du genre, soit le National du CBQ?
Évidemment, pour y répondre, on regarde tout naturellement la piste génétique de l’amélioration de la qualité de nos chiens. Dans sa théorie sur l’évolution des espèces, Darwin parlait beaucoup de l’adaptation des plus aptes. Donc, la génétique stricte, c’est-à-dire la transmission simple des gènes des parents n’explique pas tout, car il doit y avoir des sortes de mutations et des améliorations qu'acquièrent les rejetons à partir de l'expérience accumulée par les géniteurs au cours de leur vie. Dans le domaine de la sélection des chiens d’arrêt bécassiers ou gélinotiers, pensons au fait que si l’on recherche, par exemple, un bon chien à gélinotte chez des éleveurs aux États-Unis, on n’ira pas voir du côté du Texas, mais plutôt dans les États du nord-est, reconnus pour leurs densités de gélinottes. Donc, on recherche d’instinct des lignées qui se sont développées au contact de ce gibier et de son biotope et qui ont potentiellement « activé » certaines adaptations transmissibles à la progéniture.
Si l’on fait une recherche sur le principe de l’évolution, on obtient un article de Wikipedia dans lequel on peut lire (les soulignés sont de moi) :
« Une population évolue quand la fréquence d'une version d'un gène appelée allèle (ou de plusieurs allèles) s'y modifie. On voit ainsi se répandre dans certaines espèces des caractères ayant acquis, en raison de changements du milieu, une valeur adaptative qu'ils ne possédaient pas auparavant; les individus porteurs de ces caractères sont particulièrement favorisés dans le nouveau milieu, auquel ils se trouvaient en quelques sortes « préadaptés » (…) Les caractères qui se répandent alors correspondent à des allèles existant auparavant « silencieusement » au sein de l'espèce. »
Par ailleurs, la science biologique, dont l’une des branches est la génétique, a elle-même beaucoup évolué depuis Darwin, et notamment sous l’influence de l’éthologie ou « biologie du comportement », dont l’un des fondateurs est Konrad Lorenz, qui a écrit de merveilleux ouvrages sur le comportement et l’évolution dans le règne animal, et même des ouvrages super intéressants sur le chien.
Toujours dans Wikipedia, sous Konrad Lorenz, on peut lire :
Konrad Lorenz met en évidence le fait que les comportements ont un fondement physiologique indépendant. Selon lui, ils reposent sur un mécanisme de coordination centrale et une production endogène d'excitation, qui permettent de répondre sélectivement aux stimuli de l'environnement en les filtrant. Tant qu'un comportement n'est pas utilisé, il est inhibé par l'appareil physiologique, ce que l'on représente sous la forme d'un « seuil d'activation ». Un comportement ne se déclenche que par la conjonction d'une excitation interne élevée et d'un stimulus externe correspondant qui provoque le dépassement de ce seuil d'activation. C'est le mécanisme inné du déclenchement.
À cela s'ajoutent des mécanismes d'apprentissage qui modifient ces seuils. Effectivement, Konrad Lorenz constate que les animaux parviennent à une amélioration adaptative de leurs mécanismes comportementaux. L'explication qu'il propose est que la réaction conditionnée à un stimulus fait partie d'un cycle régulateur, dans lequel la réussite ou l'échec du comportement conditionné agissent sur son facteur déclencheur, le seuil d'activation. Cela permet ainsi la vérification de sa valeur adaptative (est-il favorable ou non à la conservation de l'espèce?) et par suite son encouragement ou sa suppression par modification du seuil d'activation.
En termes clairs, et pour revenir au sujet des concours sur gibier naturel par rapport aux concours sur « cocottes », disons que ce n'est pas pour rien que les Européens dépensent des milliers de $ pour mettre leurs chiens d'arrêt en présence de gibier au Québec ou en Andalousie, pour les « créancer » comme ils disent => c'est pour que cette « connaissance » acquise ou plutôt activée sur du gibier naturel s'accumule dans leurs chiens et que ce bagage puisse être conservé et transmis à la génération suivante. Comme quoi, on aurait beau avoir le plus extraordinaire pedigree qu'on voudra, si la lignée a perdu ou est en train de perdre tout contact avec le gibier naturel, bien des qualités naturelles potentielles des rejetons y perdront aussi à moyen et à long terme.
Robert Morin