Article André Cyr JdeM

La plupart des Québécois ne le connaissent pas ou en ont vaguement entendu parler. Pourtant, le Domaine de la faune des Laurentides est le nec plus ultra pour le chasseur à la recherche d’un trophée.
Située à Huberdeau, sur un domaine de 1500 acres clôturé, niché dans les montagnes avoisinant le mont Tremblant, ce n’est pas le chevreuil qu’on y traque comme dans le reste de la forêt laurentienne.
Ce sont plutôt des cerfs rouges et des wapitis, et pas n’importe lesquels.
Des bêtes au bagage génétique tout à fait exceptionnel, issues d’un cheptel ayant déjà produit des panaches records du monde.
Ferme cygénétique
Le Domaine de la faune des Laurentides n’est pas considéré comme une pourvoirie en tant que telle.
Il s’agit plutôt d’une ferme cygénétique qui produit son propre gibier en élevage avant de l’offrir à gros prix à une clientèle fortunée.
Le Domaine n’est d’ailleurs pas réglementé par le ministère des Ressources naturelles, qui gère la chasse sportive au Québec.
Comme tous les enclos de chasse au wapiti et au cerf rouge, il est plutôt régi par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ), qui légifère dans tout ce qui concerne les produits agricoles et alimentaires au Québec.
Le permis de chasse n’est d’ailleurs pas requis pour chasser au Domaine de la faune, comme c’est le cas pour le chevreuil ou l’orignal en zone libre, par exemple.
Manipulation génétique
Charles Bich (de la célèbre famille des stylos Bic) et André Desmarais, de Power Corporation, comptent parmi les actionnaires du Domaine.
Un autre partenaire de l’entreprise est Mike Bringans, un généticien de renommée internationale qui a déjà travaillé sur des cheptels privés et gouvernementaux dans plusieurs pays du monde.
Les imposants panaches qu’on trouve au Domaine sont d’ailleurs le résultat de son travail.
Certaines bêtes arborent des panaches de plus de 400 pouces, d’autres avoisinent les 500 pouces selon le système de calcul du Safari Club International.
Des panaches qui ont de quoi faire saliver n’importe quel chasseur digne de ce nom. Il suffit de jeter un petit coup d’œil au site web
http://www.laurentianwildlife.com pour s’en convaincre.
La manipulation génétique n’est pas la seule raison qui explique la grosseur des panaches, comme l’expliquait il y a quelques années l’ancien gérant du Domaine, Tony Barber, à un journaliste américain.
«Le troupeau du Domaine est nourri de façon exceptionnelle avec une alimentation qui comprend des sources alimentaires naturelles et des suppléments nutritifs.
«De plus, aucun animal n’est chassé avant qu’il ait atteint l’âge de cinq ans.»

UN COUP DE FEU DE 900 000 $
Si abattre un panache-trophée peut coûter cher, il peut aussi rapporter gros.
Lou McMurray, un richissime homme d’affaires de Fresno, en Californie, a déboursé la somme de 100 000 $ en septembre 2006 pour abattre un imposant wapiti au Domaine de la faune des Laurentides.
«Le wapiti arborait un panache de 577 3/8 po selon le système de calcul du Safari Club International, ce qui en faisait à l’époque le record du monde», raconte à ce sujet un informateur du Journal qui désire garder l’anonymat.
«Un peu plus tard, M. McMurray a revendu le panache pour 1 million $ à une compagnie d’articles de chasse qui désirait s’en servir pour ses campagnes de publicité.»
79 po de largeur
Le Journal a contacté M. McMurray, mais ce dernier ne nous a pas rappelés.
«C’était un gros mâle d’une dizaine d’années qui pesait 595 lb», s’est souvenu pour sa part le guide Tony Barber dans une entrevue accordée à l’époque à The Spokesman-Review.
«Il avait un panache d’une largeur de 79 pouces, avec 12 pointes d’un côté et neuf de l’autre.
«J’avais déjà retrouvé les bois de l’animal quatre ans de suite. Je savais qu’il mesurait plus de 500 pouces.
«Bien des gens me disaient que j’étais fou, mais quand la bête a été abattue, on s’est rendu compte que son panache était encore plus imposant que ça.»
Une bonne affaire
«Certaines personnes sont prêtes à investir des petites fortunes pour passer quelques jours au Domaine de la faune des Laurentides dans l’espoir de mettre la main sur le trophée de leur vie», poursuit notre informateur.
Dans le cas de McMurray, ce fut finalement une bonne affaire.
Qui aurait pu penser qu’on pouvait empocher 900 000 $ d’un coup de Winchester Magnum?
UN SECRET BIEN GARDÉ
La ferme cygénétique du Domaine de la faune est très discrète sur tout ce qui la concerne.
Si elle attire une clientèle internationale, elle demeure aussi un secret bien gardé pour beaucoup de Québécois.
Elle n’était d’ailleurs pas présente cette année au Salon national de la pourvoirie ni au Salon Expert Chasse, Pêche et Camping de Montréal.
Elle l’était toutefois au plus gros salon de chasse du monde, celui du Safari Club International, qui s’est tenu à Reno, au Nevada.
En fait, le Domaine de la faune se montre très réservé sur tout ce qui l’entoure.
Le Journal – malgré deux demandes dans ce sens au mois de novembre –, n’a pas obtenu l’autorisation de le visiter.
Il nous a également été impossible de nous faire confirmer l’identité des propriétaires, par exemple.
«Je ne suis pas autorisée à dévoiler leurs noms», a expliqué Heidi Malo, porte-parole du Domaine.
«Ce que je peux vous dire, c’est qu’ils sont passionnés de chasse et qu’ils ont décidé d’investir de façon notable et de développer la pourvoirie pour assurer la pérennité de sa réputation internationale.»