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La récolte d'un gros buck sur appât, est-ce possible ?

La récolte d'un gros buck sur appât, est-ce possible ?

Tout le monde est d'accord que lorsqu'on parle de gros buck, de pointage approchant les 170 B&C, on fait référence rapidement à des sujets de l'Ouest canadien. À la limite, on pense que ce genre de buck peut venir des riches terres agro-forestières du sud et du nord-est Ontarien. 

Presque tous les chasseurs sont d'accord que ce genre de buck meurt souvent grâce à des stratégies savamment élaborées pour éviter d'éveiller la méfiance légendaire du vieux survivant qu'il est devenu. 

Si je vous parle d'un buck approchant les 170 pouces B&C au Québec et récolté sur un appât, vous êtes comme moi,  vous pensez à un coup de pure «luck» ou à un buck venant d'une ferme d'élevage ou encore à un nouveau secteur jamais chassé. 

Je vais vous présenter un chum avec sa récolte de l'automne dernier qui renverse ces croyances. L'histoire commence 5 ans passés lorsque je me présente sur une terre forestière de 300 acres comme consultant. Le chasseur, Martin Ouellet, n'a rien de différent de vous et moi. Il est excité de ma présence, il espère que son investissement le mènera rapidement vers une strate de chevreuils plus âgés, que sa terre deviendra une pépinière à gros chevreuils. 

La journée est laborieuse tant le terrain est accidenté et difficile à étudier.  Nous en concluons que l'intégration de champs nourriciers à des coûts raisonnables est pratiquement impossible. La terre se décrit comme une montagne de roches recouvertes d'une très jeune forêt de feuillus (3 à 5 ans) parsemée d'îlots de chênes rouges d'environ 40 ans et de pruches matures. Le contrôle du vent difficile et le fait que les zones alimentaires et de couchages sont immenses et à la même place, font de cette terre, l'une des plus difficiles à chasser que j'ai eu la chance de visiter. 

Il y a deux ans, je rencontre de nouveau Martin sur la terre d'un de ses amis et on conclut d'un échange de service: il s'occupe de mes besoins informatiques et je l'accompagne dans la tâche d'introduire ses garçons au monde de la chasse. Une amitié commence.

Le printemps dernier, nous installons quelques sites d'appâtage à l'ours sur quelques terres dont celle de Martin et préparons quelques salines simples, composées seulement de roche de type Trophy Rock et d'un gros bloc de sel à vache, qui sont aussitôt épiées par des caméras de surveillance. L'activité sur l'une des salines installées sur la terre de Martin et située dans une cuvette recouverte de chênes rouges débute rapidement et se maintient occupée durant tout l'été. Ratons, pékans, ours et chevreuils se succèdent durant une partie de l'été. À la mi-juillet, un premier buck mature se présente avec une couronne impressionnante, un bon 140 point B&C. L'excitation gagne mon ami, il n'a jamais vu un tel chevreuil et encore moins sur sa propre terre. En début septembre, pour contrer la diminution normale d'intérêt pour la saline, nous commençons l'appâtage directement sur le même site avec un sac de 40kg de maïs au 4 jours. Aussitôt que le maïs touche le sol, les ours prennent possession des lieux et semblent chasser tous les chevreuils sans exception ou presque. Lorsque nous vérifions les photos de la première semaine, le cadeau apparaît à 1h00 du matin, un super buck d'au moins 12 pointes, large et haut. Nous l'évaluons de manière conservatrice à au moins 160 B&C. Alors commence les stratégies dans nos têtes. Aussitôt, nous convenons que le mieux serait de continuer à maintenir l'appât bien garni au même rythme de 40kg de maïs au 4 jours sans jamais changer la cédule. Mercredi et samedi en VTT directement sur l'appât, et hop, le maïs parterre en faisant fit des ours, ratons, geais bleus etc…

Notre Spypoint est toujours à l'affût pour nous. Cette dernière nous confirme que le buck est toujours là mais exclusivement de nuit. Maintenant que notre monstre québécois semble avoir développé une dépendance à notre blé d'inde, nous devons tenter de déterminer par quelle direction ce dernier arrive et où il ira pour mettre ses signes de dominance en prévision du rut. Ainsi nous pourrons peut-être nous embusquer entre l'appât et ses cachettes pour espérer avoir une récolte durant la saison de l'arme à feu.  

Le nord de la terre contient plus de nourriture naturelle mais moins de cachettes d'intérêt et l'appât était au sud, au milieu d'un flanc forestier moyennement pourvu en chênes rouges qui contenaient beaucoup de glands. Nous espérions que notre buck montait régulièrement vers les sommets du nord pour bénéficier des jeunes repousses de la coupe forestière. Un vieux chemin forestier localisé dans une dépression allait donc nous servir de ligne de tir puisqu'il séparait le nord du sud sur une longueur de plus de 250 mètres. À partir de la mi-octobre, nous passions une fois par semaine pour ouvrir des faux grattages et les asperger d'un leurre sexuel à base de glande tarsienne de la compagnie Puissance Buck Power. La position de notre mirador nous permettait de chasser dans presque tous les vents sauf les vents à tendance est, pour la plupart des jours de pluie. 

Blé d'inde, urine et patience, telle était la stratégie. Les glands de chênes rouges allaient possiblement faire le reste. J'espérais avoir le cadeau tôt en début de saison sur la fausse ligne de grattage ou un miracle de dernière minute sur l'appât à la fin de la saison de chasse. 

Vous conviendrez que la stratégie élaborée n'était pas très innovatrice. Pas au point d'écrire un livre. La force consisterait simplement de laisser l'appât exempt d'odeur même durant les 12 premiers jours de chasse. 

Pourquoi? La réponse est simple mais rarement respectée. Au courant de l'automne, les ours ont augmenté leurs nombres et leurs présences. Les chevreuils, de manière inversement proportionnelle, ont diminué leur visite à l'appât au point qu'à la mi-octobre, seul le gros buck était présent, tous les autres avaient disparus.  Normallement, les faons et les femelles n'ont plus rien à craindre des ours en automne mais lorsqu'ils mangent  dans la même assiette, c'est une autre affaire. Pour notre gros buck, ses cornes lui suffisaient à commander un certain respect ou à tout le moins une protection. 

Je savais que la «game» allait changer à quelques jours de l'ouverture de la saison de chasse à la carabine. Les ours qui auraient accès à d'autres appâts sur les terres avoisinantes diminueraient leurs présences. Certains allaient mourir  car l'Outaouais offre une chasse d'automne à l'ours et ainsi d'autres choisiraient  d'éviter les appâts soudainement trop dangereux et inondés d'odeurs humaines. C'est à ce moment là que les femelles chevreuils avoisinantes recommenceraient à venir sur notre appât devenu exempt d'ours et toujours sans odeur humaine. 

Début de novembre arrive et comme prévu, nous avons commencé à chasser en périphérie sur notre secteur de faux grattage. Deux matins seulement sans succès. Une mère ours avec trois petits de l'année et deux jeunes chevreuils nous ayant découverts par derrière, c'est bien peu pour deux jours. Dans mon cas, c'est là que je dû donner ma place et ce fut mon effort car je devais quitter pour l'ouest canadien. Mon chum allait sauter la deuxième fin de semaine de chasse pour laisser la terre le plus tranquille possible mais continuer à mettre du maïs aux quatre jours. Par contre, comme il devait changer de partenaire de chasse, il en profita pour introduire son dernier garçon à la chasse aux chevreuils. 

La cible était évidemment toujours le gros buck, la dernière fin de semaine était la date prévue de l'accomplissement si le vent soufflait du bon bord. Nous n'avions pas moins d'une centaine de photos de ce chevreuil réparti sur plus de deux mois et environ 30 visites différentes. Pas une photo de jour, la plus proche de la lumière du jour était tôt le matin vers 5h30. La chance devait donc nous sourire aussi. Le seul changement à la stratégie serait l'emplacement de l'affût proprement dit. En effet, comme nous étions maintenant à la mi-novembre, nous étions maintenant sûr que le cœur du rut battait son plein et même que plusieurs femelles étaient déjà fécondées. Nous avions convenu que père et fils chasseraient directement à portée d'appât dans l'espoir que notre buck oserait s'y aventurer de jour pour venir tester les quelques femelles qui étaient de retour depuis la disparition des ours et l'augmentation de la pression de chasse sur les terres avoisinantes.  Bref, nous espérions que nos sacrifices à garder le cœur et la majorité de la terre exempte d'odeur humaine payeraient. 

Le dernier vendredi de la saison de chasse, Martin et Geoffroy reçurent la météo demandée, un vent de faible intensité franc sud, seul vent possible pour chasser l'appât. Sans tarder, le tandem partit du camion à la brunante et débutat la longue marche. Presque 2 kilomètres car ils devaient faire le tour complet de la terre sur sa frontière pour arriver de bon vent sans même couper les trails de chevreuils que nous croyions être possiblement utilisées par notre buck pour avoir accès à notre maïs ou aux femelles. 

Ayant utilisé à chaque visite à l'appât, l'urine Puissance Buck Power juste pour créer une compétition, Martin avait décidé de faire quelques séquences violentes et rapides de rattling durant sa marche de contournement, histoire de stimuler notre buck et lui indiquer que l'on se disputait une femelle en chaleur sur son territoire. Une séquence d'environ 30 secondes, une attente d'environ 2 minutes au cas où et hop on avance… On répète 500 mètres plus loin et finalement on se rend à l'appât pour s'embusquer. 

À partir de ce moment là, motus et bouche cousue, aucun son, aucun mot sinon qu'intérieurement la prière commençait pour demander que le vent reste constant et dans la même direction. Et pourquoi pas une autre prière pour envoyer notre buck investiguer de jour le secteur? Si il avait entendu les bois de mon chum s'entrechoquer, ne devrait-il pas s'en offusquer et venir voir de quoi il en retournait? J'ose croire que lorsque ça fait deux mois que tu sens un intrus sur le terrain et que tu ne le croises jamais, si finalement tu l'entends, tu te rueras à sa rencontre. Évidemment, je ne suis pas un chevreuil mais un simple chasseur qui voudrait à l'occasion se transformer en chevreuil pour mieux les comprendre… 

Toujours est-il qu'après un avant-midi calme entrecoupée de la visite de quelques geais bleus et écureuils, un léger mouvement à la droite attire l'œil de Martin, ne prenant aucune chance, il pousse légèrement son jeune fils ensommeillé et lorsqu'il se retourne pour vérifier le mouvement, le buck dans toute sa magnificence se trouve de côté, la tête par terre à manger les quelques grains de maïs qui restaient. Le reste est maintenant de l'histoire, le duo père-fils devant la précarité de l'instant choisit que l'arme ne peut se promener de l'un à l'autre sans éveiller les sens de ce superbe buck, n'ayant comme cachette qu'un simple archis, le père lentement lève sa carabine et effectue un tir de routine à environ 50 mètres et le buck s'écroule dans ces traces. 

15 pointes, 168 B&C et plus de 200 livres, le monarque des lieux vient d'être déjoué par une petite équipe de gens disciplinés, croyants et un brin chanceux….

Louis Gagnon
www.chasserlechevreuil.com

 

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